Rien que pour les premiers mois de janvier à juin 2020, le pays a enregistré officiellement 20 cas de grossessess précoces parmi les jeunes de moins de 16 ans. Soit 147 cas en 6 mois. Alors qu’en 2019, ce chiffre était de 309 au total. On s’achemine donc vers une probabée croissance pour cette année. Les raisons qui poussent nos adolescentes à devenir mamans alors qu’elles sont encore mineures et pour la plupart scolarisees sont multiples. Immersion dans ce phénomène souvent rendu glauque parce qu’il y a un manque d’informations et que le sujet demeure extrêmement tabou.
Les sociologues et autres spécialistes de jeunes de Maurice s’accordent à dire que tout change, que ce soit en termes de développement, d’accès à des informations souvent pas justes, la volonté de faire comme les autres de son âge, la tentation de connaître une relation sexuelle même passagère à un tres jeune âge. Ajouter à cela l’impact qu’ont les réseaux sociaux sur le comportement de nos ados toujours scotcés à leurs smartphones et les fréquentations pas toujours soignées.
Si l’on compare les données des six dernières annees, l’on constatera qu’en 2014, on a dénombré 208 cas de grossesses précoces, une légère baisse en 2015 avec 195 cas, puis cela a grimpé en 2018 à 297 pour atteindre 309 cas en 2019. Et entre 2012 et 2018, il y a eu une moyenne de 25, 5 bébés qui ont pris naissance d’adolescentes.
Les facteurs-clés
Y a-t-il des facteurs plus que d’autres et communs parmi la jeune génération qui pousse les adolescentes à s’adonner à des actes sexuels, d’abord très jeunes et aussi en dehors du mariage ? Certainement, avancent des sociologues, dans leus différentes interventions dans les médias. Les parents sont avant tout pointés du doigt accusateur pour agir avec mollesse envers leurs enfants en évitant toute discussion sur le sexe. Ensuite, suit la ‘peer pressure’ qui est un facteur important. L’information qui parvient aux jeunes filles mineures sont soit insuffisantes, complexes à comprendre ou pas justes et incomplètes. Puis vient le fait prouvé de l’absence de connaissances basiques que celles d’avoir des relations protégées. D’ou le fameux slogan : ‘Sortez couverts’, soit prenez vos précautions durant des rapports en utilisant un préservatif, garçon ou fille.
Cette méconnaissance d’une protection élémentaire relève non pas d’une idiotie ou d’un quelconque refus, mais la plupart des jeunes ne savent que peu ou proue de nombreuses barrières qu’ils peuvent utiliser pour ne pas se retrouver soudainement devant ce qui pourrait être qualifié de catastrophe : l’ado tombe enceinte et le gars est alors complètement déboussolé et ne sachant pas trop quoi faire dans de telles circonstances. Des études ont démontré qu’une mère encore très jeune aura davantage de problèmes de santé, le bébé à venir a forts risques d’être en-dessous d’un poids normal, alors que la maman, souvent encore au collège, devra tout abandonner durant sa grossesse et tenter de reprendre ses études après l’accouchement. Dans une bonne majorité des cas, soit c’est l’école qui fait du chichi pour X raison, soit par pudeur et par honte du qu’en dira-t-on. Toujours est-il que cette adolescente aura un gros fardeau sur les bras : un bébé. Souvent sans le pére qui, entre-temps, se déchargera de toute responsabilité, paternelle, lui-même encore un ado et collégien sde surcroît.
Pourtant, il existe une myriade de méthodes de contraception qui peuvent éviter une adolescente de moins de 16 ans de tomber enceinte. Mais, Mary (prénom modifié) n’était au courant de presque rien. Alors que la méthode qui consiste à ce que le partenaire mâle se retire à temps est la plus fréquente, tant que chez des couples âgés entre 19 et 49 ans que chez les mineurs. “Je ne savais pas que je pouvais le forcer à se retirer de moi au moment fatidique. Même si je le voulais, mon copain allait refuser, c’est sûr, fougueux qu’il est”, nous dit cette jeune fille de 15 ans à peine. Finalement, elle est tombée enceinte et a dû tout abandonner pour s’occuper d’un petit auquel ne s’attendait pas du tout.
Elle ajoute qu’elle a entendu vaguement certaines méthodes qui peuvent être utilisées pour avoir un ‘safe sex’ mais qu’elle ne savait pas où et comment s’en procurer : “Les lois mauriciennes sont strictes sur les diverses méthodes contraceptives pour les adolescentes comme moi. Si je dois m‘en procurer, je dois me rendre dans un centre de santé public en compagnie d’un adulte, de parents proches par exemple. C’est gênant”.
Le mariage comme solution extrême
De son côte, Nadja (prénom modifié), bientôt 15 ans, est issue d’une famille éduquée des Plaines-Wilhems et occupant un emploi dit convenable et ayant été bien entourée dans le cocon familial. Elle a bien appris de quelques amies certaines méthodes de contraception qui peuvent être utilisées : “Je sais qu’il existe des pilules, des préservatifs masculins et feminins, des injections, la pilule du lendemain, entre autres. Mais, où les trouver sans avoir des regards inquisiteurs portés sur soi ?” Elle trouve absurde la section de cette même loi qui pénalise un pharmacien par exemple de permettre à des adolescents d’acheter des contraceptifs : “Certains pensent que permettre aux jeunes d’avoir accès à ces pililues et autres les encouragerait à avoir davantage de relations sexuelles. Mais, pas du tout, c’est une façon pour nous les adolescentes de nous protéger contre des grossesses non-désirées qui peuvent briser notre avenir sur tous les plans”.
Malheureusement, Nadja a u des relations avec son petit copain et un beau jour elle a appris la nouvelle qui l’a pulvérisée : “C’était comme le monde qui s’écroulait autour de moi. Quoi dire à mes parents, mes frères et soeurs qui sont mes aînés, le voisinage, l’école ? Que faire, avorter clandestinement ? J’ai approché quelques amies qui m’ont dit les risques autour d’une telle pratique, car cellle-ci ne se faisait pas des conditions hygiéniques et sûres et qu’il y avait de gros riques au niveau de ma santé si je le faisais”.
Alors, qu’a-t-elle décidé ? Tout bonnement tout révéler à ses parents, quitte à se faire lessiver : “J’en ai parlé à mon copain avant tout et il m’a proposée qu’on se marie, malgré notre jeune âge. Avec bien de difficultés, nos deux parents ont accepté de nous marier religieusement. Depuis, j’ai abandonné mes études durant l’année scolaire et j’ai tout repris après, mais ce n’était pas facile pour moi avec le regard des autres camarades de classe, les profs, la famille. Bref, cela a été un moment dur pour mon copain comme pour moi”.
Être mères sans attendre
Comme Mary et Nadja, elles sont plusieiurs adolescentes à avoir vécu cette situation d’être mères sans l’avoir volu. Pour la plupart des sociologues ou travailleurs sociaux, tels que Lucilda de l’Observatoire de la Parentalité, et Mélanie Vigier de La Tour-Bérenger, leurs interventions sur différentes plateformes médiatiques vont dans le sens qu’il faut donner le plus d’informations, les vraies et sans fioritures, aux adolescents avant même qu’ils n’envisagent des relations sexuelles étant mineurs. Pour elles, il ne faut pas avoir honte de partager les connaissances des adultes aux jeunes et ne surtout pas attendre que ce sont eux qui les recherchent et alors ils risquent d’avoir des informations erronées sur les réseaux sociaux ou d’amis qui, eux-mêmes, ne sont pas plus avertis du sujet.
En revanche, pour Monique Dinan, directrice du Mouvement à la Maternité (MAM), les jeunes se doivent de privilégier l’abstinence et non pas avoir une soif du sexe. Selon elle dans les médias, il est difficile de contenir les jeunes au niveau sexuel, mais si jamais une adolescente tombe enceinte, MAM prend en main l’accompagnement de la maman avant et après la naissance du bébé, de même que de tenter de la remettre sur les rails de la vie, comme reprendre les études qui sont prioritaires, cela donnant droit à un travail décent afin d’élever dans les meilleures conditions possibles l’enfant souvent inattendu.
Bref, un enfant ne se fait pas seul. Il en faut deux personnes. Pour cela, il est impératif, selon les experts, de bien situer les responsabilités que d’être parents du jour au lendemain n’est pas une mince affaire. Grandir le bébé et le faire devenir un/e adulte c’est aussi une autre paire de manches. La solution est de bien s’informer pour ne pas tomber dans ce que les sociologues appellent une situation infernale et souvent sans retour possible.
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Zuhaira Ameer, sociologue, sur la grossesse précoce :
“Un mariage forcé n’avantage pas l’ado enceinte”
Pas question de forcer une adolescente de moins de 16 ans et enceinte à se marier rien que pour sauver les apparences. Au final, estime la sociologue Zuhaira Ameer, tout s’effritera au détriment de la jeune maman en devenir.
Quelles sont les principales raisons qui font qu’une ado tombe enceinte ?
À 16ans, c’est une phase cruciale. Les hormones sont en pleine ébullition, les changements biochimiques changent. Il n’y a pas que les changement qu’on voit physiquement.
Faut-il rendre nos lois plus souples ?
Je ne suis pas pour amender les lois, mais pour une prévention adéquate. Je pense qu’amender les lois serait aller contre la culture et les croyances des Mauriciens, car la majorité d’entre nous sont des croyants. Tous les livres religieux encouragent le sacrément du mariage au sein d’un couple. Aller à l’encontre serait encourager des relations sexuelles avant ou en dehors du mariage, entraînant davantage de naissances hors-mariage. Si on amendait les lois, cela permettra-t-il de se marier civilement avant d’atteindre la majorité ? Je ne pense pas que cela irait dans la direction du Children’s Bill à venir et la Convention des droits des enfants dont on est signataire.
Est-ce que des familles brisées ou séparées, divorcées ou recomposées ont un quelconque effet négatif sur le comportement des ados, principalement de jeunes filles ?
C’est un cercle vicieux, car toutte séparation apporte son lot de problèmes, dont la négligence des enfants, voire l’abandon des enfants qui atterrissent à la CDU ou chez les grands-parents bien souvent. D’ailleurs, dans les derniers cas recensés, on trouve que ces grossesses précoces viennent de familles déchirées. Comme-ci ce sont les ingrédients pour avoir une autre génération de parents adolescents. Il est certes que, là ou il y a un manque d’affection parentale, les jeunes essaient de procurer cet amour ailleurs, ce qu’on appelle en terme sociologique le dysfonctionement de la famille.
Bien d’institutions secondaires refusent l’accès aux classes aux ados enceintes, alors que la loi est claire sous le Code civil. La jeune fille peut-elle rependre ses cours après l’accouchement, malgré la réticence de certains pour l’image de l’école ? Un message fort de votre part ?
Bien-sûr, on a de plus en plus de jeunes qui délaissent leurs études alors qu’ils auraient dû être à l’école à étudier pour pourvoir apporter leur contribution en tant que futurs adultes et citoyens. Adoptons l’idéologie de fonctionnaliste qui est que chacun apporte son bloc (sa part) pour le bon déroulement de la société. Au cas contraire, on se retrouve avec une “culture of dependency” , soit qu’on ne dépend que de l’allocation des pensions.
Mais encore ?
Il est vrai que la loi est claire sous le Code civil, mais est-ce que l’adolescente mère revient à l’école pour vraiment terminer ses études ou parce qu’elle a encore l’âge qui lui permet d’être au collège ? N’es-ce pas une mauvaise image pour elle, un mauvais exemple pour les autres filles de l’établissement ?
Y a-t-il un laxisme au niveau de l’autorite parentale et trop de liberte a nos ados ?
Les parents ont carrément démissionné. Il n’ont plus d’autorité sur leurs progénitures et on voit de plus en plus de “child centered family’. Certains ont tendance à vivre leur jeunesse après être devenus parents et sont souvent très irresponsables. Beaucoup d’amusements avec des amis. C’est comme s’ils voulaient rattraper le temps perdu quand ils étaient jeuness, sans enfants et sans responsabilités.
Pourquoi ce besoin d’avoir des relations sexuelles sans en connaître les conséquences pour la jeune maman en devenir et aussi le bébé, car les statistiques sont sans équivoque : le taux de mortalité entre les filles de 15 et 19 ans et enceintes est effrayant. Que faut-il faire, de l’éducation sexuelle pour responsabiliser ?
C’est le désir de vivre ce que d’autres jeunes voient au quotidien, la tendance, aussi à travers les séries, films, acteurs, chanteurs. Tout cela est très tendance de nos jours…faire comme les “famous youtubers”. L’éducation sexuelle doit être partie intégrante du programme éducatif dès le primaire. L’adolescence est une période où la jeune fille se développe physiquement aussi bien que biologiquement pour atteindre son potentiel en tant que femme. Alors, si on passe à une autre phase, c’est clair qu’on est en train de forcer la nature.
Souvent, des mariages sont organisés avec le consentement des parents pour ‘arranger’ les choses. Est-ce qu’une ado est-elle prête à assumer le double rôle de maman et d’épouse ?
Surtout pas. Une ado ne peut être prête à affronter une telle responsabilité. D’ailleurs, on a beaucoup de psychologues spécialisés pour les enfants qui en parlent très souvent dans les médias. Concernant l’aspect moral et surtout émotionnel d’une ado pour prendre la responsabilité d’un mariage, vivre à deux et bientôt trois est compliqué. Beaucoup de cas ont prouvé que des mariages forcés – séparation/divorces ou autres problèmes sociaux – agravent les choses au lieu de colmater les brèches. Un mariage forcé d’une adolescente pour ‘arranger’ les apparences n’avantage pas cette jeune maman en devenir.
Accroche
“Si on amendait les lois, cela permettra-t-il de se marier civilement avant d’atteindre la majorité ? ”**********************************************
Et ces méthodes sont…
Selon des études sur le ‘youth profile’, 40 % des jeunes reçoivent des informations sur la sexualité de leurs amis. 1% de garçons les reçoivent à travers leurs parrents, alors que ce chiffre passe à 15% chez les filles. Pour ce qui est du mode de vie des jeunes filles, 2% seulement qui sont âgées entre 15 et 19 ans utilisent des préservatifs et 1% de pilules contraceptives.
À ceux qui avancent qu’une éducation sexuelle très tôt aux jeunes les pousseraient à avoir des relations sexuelles et que la solution serait d’inculquer en même temps cette éducation sexuelle avec des enseignements des valeurs.
Il y a différentes méthodes de contraception pour des adolescents quand l’abstinence ne peut se faire. Selon le gynécologue le Dr Ramdaursingh lors d’un débat public, parmi les méthodes les plus utilisées, on trouve le préservatif, la pilule contraceptive et la pilule du lendemain. Ces méthodes ne sont fiables que si on sait s’en servir, selon lui. Il recommande cette méthode pour éviter les infections sexuellement transmissibles (syphilis, gonorrhée, VIH). Le médecin est d’avis qu’il faut oublier le stérilet pour les adolescentes, car elles peuvent avoir des infections vaginales. La méthode du calendrier n’est pas adaptable pour cette tranche d’age, car leurs mentruations ne sont pas régulières, selon le gynécologue toujours lors de débats publics..
Tous s’accordent à dire qu’une bonne éducation sexuelle dès l’âge de 11-12 ans permettrait bien des soucis, tant aux adolescents que tous ceux qui les entourent. Pour reprendre Monique Dinan quand elle intervenait dans les médias, Maurice a besoin d’un service-conseil pour faire comprendre aux jeunes qu’il ne suffit pas de se plier à leurs pulsions sexuelles en amont sans voir en aval les circonstances de leurs actes.